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Marc L* : un article qui a fait du bruit.


C'est en 2009 qu'un sombre inconnu fait le buzz sans le vouloir. Dans un article du Tigre « curieux magazine curieux », de novembre 2008, la vie de Marc L*, homme ordinaire, est dévoilée dans ses plus petits détails. Le rédacteur, le mystérieux Raphaël Meltz, a utilisé internet pour faire des recherches sur cette personne qui lui était au départ totalement inconnue. La recherche n'a pas été vaine comme on peut le voir.  
Cetl article vaut le détour qui plus est. L'article parle des vacances de Marc L*, de ses petites amies, de ce qu'il aime, ce qu'il fait. Rien de néfaste cependant pour sa personne. Ce portrait montre bien le danger de laisser traîner sa vie sur des sites comme Facebook, flickr et youtube.
L'article est publié sur internet le 7 janvier 2009 mais il est, suite à une demande du concerné, encore plus anonymé (ville, lieu de travail...).

Immédiatement après sa publication sur internet, l'article est présent partout sur le web. Tout le monde en parle ! Le premier interview est mené par Presse Océan, ce sera le seul où Marc L* répondra. Par la suite, il décidera en accord avec le magazine Le Tigre de ne plus parler de ce sujet avec les médias afin d'étouffer au plus vite le phénomène médiatique. Cela n'empêchera pas les journaux de multiplier les articles, le sujet devenant en quelques semaines un buzz médiatique. Les journaux, loin d'appuyer leur analyse sur les risques d'internet, partent dans le sensationnel de l'affaire. Les rumeurs courent, les journaux inventent : Marc L* est alors posé en victime face au journal le Tigre qui sera sous peu traîné en justice. Face à ces absurdités Le Tigre se tait et l'histoire se tarit d'elle même.



 Mais sur internet aussi les commentateurs sont multiples. L'article prend alors la forme d'un débat, ce que recherchait le rédacteur.  Extrait du second article du rédacteur : Marl L* La genèse d'un buzz médiatique :

En relisant bout à bout les centaines d’articles, de notes de blogs, de réactions dans les forums, et les mails que nous avons reçu, il apparaît que la plupart des commentaires sont restés mesurés (les expressions « c’est flippant ! » et « ça fait peur... » revenant de façon exponentielle). Quelques assertions ont néanmoins été émises à tort :

Le Tigre est un « torchon » ayant pour but d’aller traquer la vie privée de pauvres anonymes ! Ne rions pas : c’est le commentaire le plus fréquent de la part de gens qui manifestement n’ont pas lu Le Tigre, ce qui n’est guère étonnant, mais pas non plus le premier paragraphe du Portrait qui précise bien : « Ce sera violemment impudique, à l’opposé de tout ce qu’on défend dans Le Tigre. Mais c’est pour la bonne cause. »

Le Tigre aurait voulu se faire connaître en lançant un « buzz médiatique ». Notre réaction face aux médias tient lieu de réponse. Il est d’ailleurs intéressant de noter que dès qu’une forte ampleur est donnée à quelque chose, les théories du complot surviennent : « Mais comment pouvez-vous croire des bêtises pareilles ? Le Tigre est imprimé à quelques milliers d’exemplaires et évidemment, le candide ainsi révélé lisait lui aussi par hasard ce magazine. Histoire montée de toutes pièce par ce magazine et publicité gratuite relayée par toutes les rédactions francophones. » (commentaire sur le site du Figaro).

« Ceci dit, l’article nous apprend quoi, vraiment ? » Un lecteur du Tigre répond à ce blogueur qui l’interroge : « Bah rien, strictement. C’est pour ça que je t’en avais pas parlé quand il est sorti dans le journal papier le mois dernier ;-) C’est juste sympa à lire, c’est pas mal écrit... C’est un bon exercice littéraire. » La réponse semble juste ; le fait d’avoir été l’objet d’un énorme « buzz » survalorise le texte de départ, et de nombreux commentaires agacés devraient en réalité s’en prendre plus au bruit qu’a généré l’article qu’à celui-ci.

Le Tigre agite la menace internet de façon déraisonnée. « Les couteaux c’est très dangereux ! Ça tue carrément ! J’en ai une bonne trentaine chez moi. Mais comme je m’en sers correctement ça n’a encore fait de mal à personne... » m’écrit un internaute qui nous accuse d’aller dans le sens d’un reportage de France 2, diffusé peu de temps auparavant dans « Envoyé spécial », sur les dangers de Facebook. Là encore, il y a glissement : c’est la supposée « traque » qui a semblé être une menace ; or, de traque, il n’y avait évidemment pas.

« Pauvre Marc L. ! » Mais Marc L. n’existe pas, puisque l’ensemble du portrait a été adapté. Certes il est possible de se procurer un volume 28 en papier pour retrouver celui qui se cache derrière ce pseudonyme, mais pour quelle raison ? Le raisonnement se retourne sur ceux qui le pratiquent.

« Facebook c’est dangereux. » L’immense majorité des réactions a tourné autour de Facebook. Cela montre bien que l’article du Tigre a plus été un détonateur qu’un véritable outil pour ceux qui l’ont commenté, car Facebook n’était que minoritairement utilisé dans le portrait de Marc. C’est plutôt le croisement entre Flicker/Youtube (les images ou vidéos mises en ligne, avec prénom et parfois noms de familles des personnes) et les recherches Google qui a donné corps à l’article : untel est cité sur cette photo, justement il habite dans cette ville et il exerce tel métier, etc. C’est beaucoup plus la question du recoupement que la question de la gestion de la vie privée qui était soulignée. Que Facebook dispose d’options permettant de verrouiller sa vie privée, personne n’en disconvient.

D’autres questions, plus intéressantes, ont été posées. D’abord, la question juridique. L’article du Tigre tombait-t-il sous le coup de la loi concernant le respect de la vie privée de quelqu’un ? L’article disponible sur notre site, certainement pas, puisque la personne visée est totalement indécelable (ce pourrait être une fiction : aucun élément permet de savoir si Marc L., en tant que tel, existe). Pour la version papier, il n’en est pas de même. Un blogueur-juriste, Diner’s Room, s’est interrogé sur la question. Voici sa conclusion : « Ce n’est pas parce qu’il est possible de se livrer à des recherches sur internet que celles-ci sont licites. Et ce n’est pas parce qu’on disperse des informations qu’il est loisible au tiers de les réunir. Précisément parce qu’on les disperse. » Mais comme le remarque un commentateur, d’une part « la question de la finalité est centrale : que peut-on penser de la finalité d’une publication accessible à tous sur le web alors que sur ce même web on peut restreindre l’accès à ces publications facilement à un cercle d’autorisés ou simplement ne pas les mettre ? » En outre « peut-être que la recherche sur un nom via Google donnera automatiquement un contenu proche de celui du Tigre à l’avenir ? Faut-il l’interdire et comment ? » 

De fait, Marc L. a répondu à une deuxième interview, à lepost.fr , le lendemain du déclenchement de l’affaire... Il a annoncé qu’il n’entendait pas porter plainte : « Je n’ai pas grand-chose à faire, toutes ces informations étaient accessibles. » Si nous avions été attaqués en justice, nous aurions en premier lieu plaidé, évidemment, la question de l’exemplarité de notre démarche : il va bien de soi que le portrait du Tigre publié dans Closer n’aurait pas eu le même but qu’ici, ce que précise la phrase de début (« Un message se cache derrière l’idée de cette rubrique »). Par ailleurs, nous aurions souligné que c’est l’article de Presse-Océan, qui l’identifie beaucoup plus qu’il n’était identifié dans Le Tigre (opposition magazine rare/presse quotidienne régionale explicitée supra) qui a lancé toute l’affaire. Si Marc avait refusé de parler au journaliste... Rien ne serait peut-être arrivé. Il est d’ailleurs assez paradoxal de lire, dans la bouche de Marc L., cette phrase : « Avec l’article de Presse-Océan, je n’ai encore pas dormi de la nuit. D’ailleurs, ce matin, je ne suis pas allé bosser. » En ce cas, pourquoi répondre encore à une nouvelle interview relançant la machine ?

Pourquoi ce portrait Google a-t-il fait tant de bruit ? Un blogueur propose une hypothèse intéressante : « Les méthodes sont très simples et c’est ce qui rend la chose pertinente. Le virtuel peut donner une impression d’anonymat, c’est le transfert de ces infos vers un média traditionnel qui a tant d’impact, on prend tout à coup conscience que ces infos sont tangibles malgré la virtualité et qu’elles peuvent être utilisées dans le «vrai monde». » L’affaire « Marc L. » est dorénavant devenue un cas d’école, bien loin du Tigre. Alain Juppé le cite pour indiquer qu’il se méfie de Facebook dans un article du Figaro (cf. ouverture de ce Tigre), et Isabelle Mandraud, la responsable de la rubrique « police » du Monde, le prend comme exemple dans un article intitulé « Avec le développement des réseaux sociaux, la vie privée s’expose à la surveillance » qui évoque le fait que « les enquêteurs collectent en toute légalité des renseignements sur un individu, un groupe, un thème » : « Les «Web fichiers» reposent sur le volontariat. Chacun peut librement y exposer ce qu’il souhaite. Mais les individus n’en mesurent pas toutes les conséquences. »

Les commentaires sont multiples et contrairement aux médias, ils parlent des risques de l'internet. Bien entendu, tout le monde ne croit pas à cette histoire mais là encore une question se pose :. elle serait inventée de toute pièce par le magazine pour prouver la naïveté et le voyeurisme des médias et du public.

A la suite de ce buzz, le Tigre entame sa défense en publiant l'article Marc l* , genèse d'un buzz médiatique. Le rédacteur nous raconte alors l'histoire de l'écriture de son précédent article dès le début. On y voit la création de de l'article, les recherches mais également les réactions qu'il pu engendrer, les mail échangés avec le concerné, mais surtout il met en avant le but de ce portrait.

Quoiqu'il en soit, cette histoire a fait beaucoup de bruit. C'est ce qu'on appelle un Buzz. Cela dit, que l'on croit ou pas à cette histoire, le sujet nous fait réfléchir aux danger d'internet .



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